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CONTES DU SOLEIL ET DE LA PLUIE

UNE BONNE FORTUNE

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Fervannes, le romancier célèbre, aussi connu par ses aventures que par ses livres, continua :

— Et dans l’enveloppe que je reçus, pas autre chose que ceci : la feuille d’état-major, numéro 19, ou plutôt le quart de cette feuille, c’est-à-dire Yvetot sud-est.

Et sur la carte, tout simplement une croix au crayon rouge dont les deux lignes se rencontraient au point d’intersection des deux routes qui vont, l’une de Rouen au Havre, l’autre d’Yvetot à Neuf-Châtel.

J’examinai l’enveloppe. Elle portait le timbre de Doudeville, localité située à une douzaine de kilomètres de l’endroit désigné par la croix.

L’adresse était écrite, il n’y avait pas de doute, par une main de femme.

Qu’est-ce que cela voulait dire ? Certes, je le sais par de nombreuses lettres, les légendes du pays de Caux que j’ai recueillies et publiées, m’ont valu une petite renommée spéciale dans cette région. Mais pourquoi ce message anonyme et mystérieux ?

Je le déchirai.

Le lendemain le courrier m’apportait une enveloppe identique. Je l’ouvris : même carte d’état-major, même croix au crayon rouge.

Le surlendemain, nouvel envoi. Et les jours suivants également.

J’avouerai que cette obstination ne laissait pas de m’intriguer. L’adresse eût révélé une écriture d’homme, que j’aurais cru à une mystification, et les choses en seraient restées là. Mais c’était une écriture de femme !