Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/487

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Voilà ce que George Sand, dont on célèbre actuellement le centenaire, écrivait à la comtesse d’Agoult en 1836. Et remarquez qu’à cette époque elle n’est plus une toute jeune femme, ou du moins qu’elle a passé cet âge heureux où la santé déborde et réclame, pour ainsi dire, les fatigues excessives, les dépenses nerveuses, les folies, les extravagances. Elle a trente-deux ans, celle qui se jette ainsi dans les rivières et s’endort ensuite avec ses vêtements mouillés.

Mais, jusqu’au soir de sa vie, George Sand resta cette femme ardente, vigoureuse, inlassable, à qui l’exercice fut nécessaire et le mouvement indispensable. Ouvrez au hasard la correspondance, l’Histoire de sa vie, les Lettres d’un voyageur, partout même effervescence physique, même besoin de sensations violentes, d’espace et de plein air.

« J’arrivai à Oliero vers les quatre heures, après avoir fait seize milles à pied en dix heures… ».

« Après avoir quitté Alfred (de Musset) que j’ai conduit jusqu’à Vicence, j’ai fait une petite excursion dans les Alpes… J’ai reconnu que ce genre de fatigue m’était fort bon, physiquement et moralement… Je puis aller loin ainsi, en dépensant cinq francs par jour, et en faisant huit ou dix lieues… ».

« J’ai été avec Solange jusqu’au Marborée, l’extrême frontière de France. La neige et le brouillard, la pluie et les torrents ne nous ont laissé voir qu’à demi le but de notre voyage. Nous avons fait ce jour-là quinze lieues à cheval. »

Élevée aux champs, enfant solitaire et indépendante, elle garda toujours le goût des grandes chevauchées et des marches interminables. C’est une campagnarde, solidement bâtie et bien résistante. Ses sympathies vont vers les forts. Elle admire les exploits des hommes et les égale. Elle a des jouissances d’homme, d’homme bien musclé, vaillant, énergique, qui s’exalte à la flamme de sa jeunesse et se grise de sa propre vigueur.

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