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dans la salle des coffres. Sa signature sur le registre en témoigne.

M. Lenormand attendit respectueusement que son supérieur eût fini de parler. Puis, sans même se donner la peine de répondre directement à l’attaque, il continua :

— Vers deux heures de l’après-midi, Lupin, aidé d’un complice, un nommé Marco, a ligoté M. Kesselbach, l’a dépouillé de tout l’argent liquide qu’il avait sur lui, et l’a contraint à révéler le chiffre de son coffre du Crédit Lyonnais. Aussitôt, le secret connu, Marco est parti. Il a rejoint un deuxième complice, lequel, profitant d’une certaine ressemblance avec M. Kesselbach, — ressemblance, d’ailleurs, qu’il accentua ce jour-là, en portant des habits semblables à ceux de M. Kesselbach, et en se munissant de lunettes d’or — entra au Crédit Lyonnais, imita la signature de M. Kesselbach, vida le coffre et s’en retourna, accompagné de Marco ; celui-ci, aussitôt, téléphona à Lupin. Lupin, sûr alors que M. Kesselbach ne l’avait pas trompé, et le but de son expédition étant rempli, s’en alla.

Valenglay semblait hésitant.

— Oui… oui… admettons… mais ce qui m’étonne, c’est qu’un homme comme Lupin ait risqué si gros pour un si piètre bénéfice… quelques billets de banque et le contenu, toujours hypothétique, d’un coffre-fort.

— Lupin convoitait davantage. Il voulait, ou bien l’enveloppe en maroquin qui se trouvait dans le sac de voyage, ou bien la cassette en ébène qui se trouvait dans le coffre-fort. Cette cassette, il l’a eue, puisqu’il l’a renvoyée, vide. Donc, aujourd’hui, il connaît, où il est en voie de connaître, le fameux projet que formait M. Kesselbach et dont il entretenait son secrétaire quelques instants avant sa mort.

— Quel est ce projet ?

— Je ne sais pas. Le directeur de l’agence Barbareux auquel il s’en était ouvert m’a dit que M. Kesselbach recherchait un individu, un déclassé, paraît-il, nommé Pierre Leduc. Pour quelle raison, cette recherche ? et par quels liens peut-on la rattacher à son projet ? je ne saurais le dire.

— Soit, conclut Valenglay. Voilà pour Arsène Lupin. Son rôle est fini, M. Kesselbach est ligoté, dépouillé… mais vivant !… Que se passe-t-il, jusqu’au moment où on le retrouve mort ?

— Rien, pendant des heures ; rien jusqu’à la nuit. Mais au cours de la nuit quelqu’un est entré.

— Par où ?

— Par la chambre 420, une des chambres qu’avait retenues M. Kesselbach. L’individu possédait évidemment une fausse clef.

— Mais, s’écria le préfet de police, en-