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plusieurs centaines de nos hommes célèbres et de nos riches banquiers.

— Et la conclusion de tout cela, mon cher Lenormand ? interrompit Valenglay.

— C’est que, monsieur le président, si les camarades qui composent l’entourage immédiat de Lupin lui sont dévoués jusqu’à la mort, dévoués par affection et admiration, et dévoués par intérêt, les autres, échappant à son influence et à son action directe, ne recevant que des subsides assez faibles sans doute, et n’ayant point part à la distribution des gros butins, les autres ne sont peut-être pas à l’abri… de la tentation… On peut au besoin s’entendre avec eux… N’est-ce pas, Auguste ?

L’huissier ne sourcilla pas.

M. Lenormand s’approcha de lui.

— Combien veux-tu ?

— Pour quoi faire ?

— Ah ! ah ! tu commences à saisir… Alors, nous ne sommes pas loin de compte… Voilà : il s’agit de me dire ce que tu sais…

— Sur qui ?

— Sur Lupin ?

— Je ne sais rien.

— Tu mens.

— Non. Je ne l’ai jamais vu. Je ne le connais pas.

— Après tout, c’est possible. Mais comment communiquez-vous ?

L’huissier se tut.

— Ah ! oui, les conditions ne sont pas fixées. Qu’est-ce que tu veux ?

— La liberté.

— Ne dis pas de bêtises… Tu es pincé, tu suivras la filière comme les autres, et tu feras ta peine… cinq ans… dix ans… ça ne me regarde pas. Non, pense à l’avenir… à tes vieux jours… Quand tu sortiras de là, tu ne vaudras pas grand’chose… il faudra vivre… Combien veux-tu ?

— Cinquante mille.

— Tu es fou ?

— Je ne suis pas fou. Par Marco vous remontez à Lupin, et Lupin vaut bien cinquante billets.

— Je t’en offre dix… pas un sou de plus.

— Quarante… pas un sou de moins.

— Monsieur le président, c’est à vous de décider.

Valenglay prononça :

— Dix mille après l’arrestation de Marco, trente après celle de Lupin.

— Ça va, fit l’huissier.

— Alors, si ça va, reprit M. Lenormand, bavarde et joue franc jeu … sans quoi… Comment, communiquez-vous ?

— Par un camarade.

— Marco, n’est-ce pas ?

— Oui.