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Je sanglotais. J’interrogeai le docteur. Il me répondit : — C’est la fin… un transport au cerveau…

Le prêtre entra. Je m’éloignai, et me tins dans le salon. Je ne pleurais plus. Des idées se succédaient en moi que je ne comprenais pas. Je me sentais très seul, simplement, seul déjà, et j’avais peur.

Rompant le chuchotement de la confession, la voix du prêtre s’éleva, indignée, me sembla-t-il. La cloison était mince, j’entendis :

— Mon fils, vous êtes un grand pécheur.

Quelque chose comme un rire crispa ma bouche. Cette pauvre maman Jumelin, un grand pécheur ! Le murmure recommença, j’écoutai, mais il était trop faible.

Puis soudain, une voix haute accentua cette phrase étrange :

— Il n’en faut pas douter, mon fils, c’est là qu’on doit chercher la cause de la maladie noire qui a décidé votre frère à se tuer. Vous auriez dû vous séparer, ne plus vivre ensemble, vous fuir l’un l’autre, comme deux ennemis mortels.

Je me levai épouvanté. J’entrouvris la porte et j’aperçus ma mère. Ses yeux étaient fermés, les lèvres blanches s’agitaient, mais je ne distinguais qu’un long gémissement, des plaintes… Autour d’elle, les rideaux au lit presque fermés étouffaient encore davantage la confession. Sur les draps, plus bas que