Page:Leblanc - Contes Heroïques, parus dans Le Journal, 1915-1916.djvu/13

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l’obligeais à revenir plus tard et à les remettre. Des enfantillages, n’est-ce pas, mais si vous saviez comme je l’aime, mon petit !

» Et puis voilà… Je me suis dit que je n’avais plus le droit de les garder ainsi. J’ai pensé à tous ceux qui n’en ont pas et qui souffrent. Non, il ne faut plus qu’il y ait rien dans les tiroirs, maintenant que les soldats ont froid.

» Mon ami, vous trouverez dans les poches le briquet que je lui avais offert à sa fête, et puis sa pipe, sa blague à tabac, son crayon, son canif, et puis un billet de cinq francs… et aussi une carte postale avec mon nom et mon adresse, pour que vous puissiez m’écrire. Je vous donne tout cela avec plaisir, et je crois, voyez-vous, que ça lui portera bonheur. Ah ! c’est que j’ai tellement peur pour lui ! Je le connais, mon garçon, c’est un brave, et il doit se battre au premier rang. Mon Dieu ! s’il lui arrivait du mal ! Priez pour lui, je vous en prie. Moi, chaque soir, je vous promets de prier pour vous.

» Je vous embrasse, mon ami.

 » Veuve Bergerin. »

C’est à peine si Bergevin put achever la lettre.