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la fortune de m. fouque

Il alla plus loin et, dans des crises de bavardage, il révéla des détails physiques : elle avait une poitrine, cette Julie, et des bras, et des jambes, et une peau surtout, une peau admirable ! Une fois, étourdi par des libations trop nombreuses, il dévoila des particularités plus intimes encore : « Figurez-vous, mon cher, qu’elle a, au haut de la cuisse gauche, une fraise énorme, une vraie pièce dè dix sous, toute blanche. Ah ! on ne s’ennuie pas avec elle. Par malheur, pas de tempérament. Que voulez-vous, elle n’aime pas ça !… »

D’abord on s’amusa de ces indiscrétions, on l’excitait, on réclamait des nouvelles de Julie et de sa fraise. Puis on se lassa de lui. Il répétait invariablement les mêmes choses et, d’avance, l’on savait ses paroles. On se méfiait de ses petits bouts de phrase hachés, hésitants. On le fuyait comme un importun, on lui tournait le dos comme à un quémandeur.

— Vraiment, il n’est pas drôle, Fouque, c’est un homme capable, mais ça n’a pas de suite dans les idées.

Et son isolement recommença plus âpre et plus pesant. On ne lui parlait pas, on ne l’écoutait