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l’eau purifiante. L’espace y est infini. Il y semait ses rêves à grandes envolées d’imagination. Vers le ciel plus vaste, il élevait son intelligence. Car, tout en haut, loin des égoïsmes qui tuent, dans l’immensité sereine, planent les esprits libres, les ouvriers de l’art, les chercheurs d’idéal. On l’y appelait.

À la craie, sur un mur de briques, il traça :

« Je suis sauvé ! »


IV


Marc Hélienne revint à Paris en hâte. Avec quelle nonchalance avançait ce train ! Il le précédait, lui, le tirait de toute son ardeur. — Bon pourboire, dit-il au cocher hélé près de la gare. Il se précipita dans son lit, expédia son sommeil, revêtit sa robe de chambre, et se rua sur sa table de travail. Enfin !

Enfin, il était le maître de sa destinée. L’ère nouvelle s’ouvrait. Il avait le droit de vivre de la vie véritable.

— Ne tardons pas une minute, s’écria-t-il, ce serait un sacrilège.

Une plume et de l’encre l’attendaient. Il trempa l’une dans l’autre, et de la pointe noircie menaça la blancheur d’une feuille de papier.

Il fut assez perplexe. Qu’allait-il écrire ? Et puis pourquoi cette première manifestation de sa personnalité se traduirait-elle par un exercice de style, plutôt que par tout autre procédé ?

Ces questions le firent trébucher dans sa course. Il se releva. À aucun prix, il n’eût voulu s’arrêter, après un si beau départ. Sa main s’impatientait autour de son porte-plume et comme aucun sujet ne le préoccupait en dehors de lui-même,