est invariablement de ton avis. Celle-là parle toujours la première parce qu’elle représente des idées toutes faites, et elle parle toujours sans hésitation parce qu’elle s’exprime de la même manière depuis mon enfance, je pourrais dire depuis des siècles. Mais que veux-tu ! dès que je réfléchis, je ne suis plus d’accord avec elle. Ainsi, pour ce qui est de Claire, mon premier mouvement est de me donner tort, et puis je raisonne, et je me dis que tout cela n’a vraiment pas beaucoup d’importance, que le concours de ma sœur ne nous choquerait pas si elle était mariée, qu’elle a bientôt dix-huit ans, et que le fait de porter quelques lettres et de savoir les détails d’un amour qu’elle connaît depuis longtemps, ne la rendra pas moins honnête. Tout dépend des caractères, et le sien ne subit que les influences que sa raison admet. Et je conclus que, là encore, et moi tout le premier, nous nous embarrassons d’un tas de préjugés qui ne résistent pas au moindre examen. Alors… j’agis.
— Eh ! agis à ta guise, mais laisse ta sœur en dehors de tes combinaisons.
— Je ne puis te le promettre, mère, je ne suis pas sûr de moi.
— Comment, s’écria-t-elle exaspérée, tu n’es pas sûr de toit il faudra donc que je vous surveille ! on dira que ma fille est la complice de mon fils, l’amie de sa maîtresse, mais c’est monstrueux ! J’aimerais mieux t’aider moi-même… oui, j’aimerais mieux être ta complice, porter tes lettres,