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L’ENTHOUSIASME

bas du jardin où, parmi les saules, coule la rivière. Un pont la traverse et débouche au milieu de prairies. C’est par là, par le sentier qui côtoie le bord de l’eau, que nous nous promenions en cueillant des fleurs destinées à mère.

Mais une horloge sonna. En quelques minutes j’atteignis les murs du château, selon l’appellation pompeuse que la maison de M. Hamelin empruntait à la belle ordonnance des pelouses et à la vétusté des arbres dont elle est environnée.

Mon couvert était mis dans la salle. Je m’assis. Au bout d’un instant la porte s’ouvrit. Mme Darzas entra.

— Vous ! m’écriai-je.

Il n’y avait certes rien d’étonnant à ce qu’elle fût là, mais je m’y attendais si peu, et cette apparition me semblait si extraordinaire, que j’en restais confondu.

Elle me dit en souriant :

— Vous ne saviez donc pas que Philippe était en voyage ?

Pourquoi ai-je affecté l’ignorance puisqu’une lettre de mère reçue le matin m’avait annoncé ce départ ?

— Et que je demeure ici ? ajouta-t-elle,

— Vous demeurez ici !

Je devais la regarder très drôlement, car elle éclata de rire. Je prononçai d’un air convaincu :

— Je suis content… je vous assure que je le suis.

— Quels motifs avez-vous d’être content ?