étrangers l’un à l’autre que si nous séparaient des distances incommensurables. Chaque minute dressait entre nous sa part d’obstacle. Geneviève, Geneviève… murmurais-je intérieurement.
Au même instant, elle s’inclina vers moi et mit sa tête sur mon épaule, sans un mot.
La nuit solennelle s’éclairait d’étoiles de plus en plus nombreuses, et, exténué de joie, prêt à défaillir sous l’adorable fardeau, je me raidissais de toutes mes forces vers ces étoiles, témoins de mon triomphe. Une femme reposait sur ma poitrine. Des cheveux de femme me flattaient le cou. Je respirais l’odeur d’une femme.
Il m’eût été bien agréable de refermer mes bras autour de sa tête et que ma joue touchât la sienne. Mais mon ingénuité ne m’autorisait pas à croire que ce fût autre chose qu’un geste de confiance et de sympathie auquel s’abandonnait Geneviève. Un mouvement, un indice d’émotion, l’effaroucheraient. Ah ! pourvu qu’elle ne me crût pas surpris d’un acte aussi normal ! Cependant mon cœur sautait comme une bête folle, et je brûlais de désir.
— Quelle belle soirée, énonçai-je, ce qu’il y a d’étoiles !
Le tremblement de ma voix m’épouvanta, et je repris aussitôt d’un ton ferme :
— Voici la Grande Ourse… et puis le Dragon… et puis…
Je ne pouvais plus. Des sanglots me secouaient. Heureusement mère nous appela. Comment ai-je