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L’ENTHOUSIASME

coulaient tout autour d’elle, et ma mélancolie ne tenait pas devant de pareilles révélations.

— Ah ! soupirais-je, c’est une femme vraiment remarquable.

Une après-midi, dans le salon des Darzas, je tapotais le piano d’un doigt distrait quand la porte s’entr’ouvrit. Geneviève parut.

— Vous êtes seul ?

Elle vint à moi rapidement, saisit ma tête entre ses deux mains, et me prit la bouche.

— Ah ! Geneviève, balbutiai-je avec une sorte de reproche, tandis qu’elle s’enfuyait.

J’étais suffoqué, presque endolori. Elle avait pénétré jusqu’au fond de mon être, et mon cœur souffrait comme si son baiser l’eût atteint. Je courus après elle jusqu’à la chambre de Philippe.

— Vous savez, Philippe, je me mets à votre disposition, nous pourrions jouer à quelque jeu, aux dames, aux cartes…

Je ne quittai plus Mme Darzas. Au risque de tout compromettre, je la suppliais et lui adressais des signes désespérés. « Encore une fois, je vous en prie », implorais-je en m’approchant d’elle.

Les occasions furent rares d’abord. Nous nous embrassions dans les coins, entre deux portes, derrière les gens. Puis les obstacles cessèrent, notre bonne existence de liberté recommença, et j’eus à loisir les lèvres de ma maîtresse.

Je m’en grisai tellement que la fin de mon séjour à Bellefeuille arriva sans que j’eusse le temps de