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L’ÉCLAT D’OBUS

idée affreuse. Il serait effrayant que je ne pusse pas répondre à vos questions et que vous ne pussiez pas répondre aux miennes. Le sort d’Élisabeth dépend peut-être des quelques phrases que nous allons prononcer. Car la vérité est entre nous. Un mot peut la mettre en lumière, et tout nous presse. Il faut parler dès maintenant, quoi qu’il arrive.

Son émotion surprit M. d’Andeville qui lui dit :

— Ne serait-il pas bon d’appeler Bernard ?

— Non ! non ! fit Paul, à aucun prix ! C’est une chose qu’il ne doit pas connaître, puisqu’il s’agit…

— Puisqu’il s’agit ? questionna M. d’Andeville, de plus en plus étonné.

Un homme tomba près d’eux, frappé par une balle. Paul se précipita : touché au front, l’homme était mort. Et deux balles encore pénétrèrent par une ouverture trop grande que Paul fit boucher en partie.

M. d’Andeville, qui l’avait aidé, poursuivit l’entretien.

— Vous disiez que Bernard ne doit pas entendre parce qu’il s’agit ?…

— Parce qu’il s’agit de sa mère, répondit Paul.

M. d’Andeville s’exclama :

— De sa mère ? Comment ! il s’agit de sa mère ?… De ma femme ? Je ne comprends pas…

Par les meurtrières on apercevait trois colonnes ennemies qui s’avançaient, au-dessus des plaines inondées, sur des chaussées étroites convergeant vers le canal en face de la maison du passeur.

— Quand ils seront à deux cents mètres du