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L’ÉCLAT D’OBUS

regardait de ses yeux terrifiés et qu’il eût voulu étrangler, à pleines mains, cette femme que faisait-elle là ? Que faisait Élisabeth au milieu d’officiers avinés et d’Allemands plus ou moins équivoques, à côté du prince Conrad, à côté de la monstrueuse créature qui le poursuivait de sa haine ?

La comtesse Hermine d’Andeville ! Élisabeth d’Andeville ! La mère et la fille ! Il n’y avait pas un seul argument plausible qui permît à Paul de donner un autre titre aux deux compagnes du prince. Et, ce titre, un incident lui fournissait toute sa valeur d’affreuse réalité, un moment après, lorsque le prince Conrad se levait, une coupe de Champagne à la main, et hurlait :

— Hoch ! hoch ! hoch ! Je bois à notre amie vigilante ! Hoch ! hoch ! hoch ! à la santé de la comtesse Hermine !

Les mots épouvantables étaient prononcés, et Paul les entendit.

— Hoch ! hoch ! hoch ! vociféra le troupeau des convives. À la comtesse Hermine !

La comtesse saisit une coupe, la vida d’un trait et se mit à dire des paroles que Paul ne put pas percevoir, tandis que les autres s’efforçaient d’écouter avec une ferveur que rendaient plus méritoire les copieuses libations.

Et, elle aussi, Élisabeth écoutait.

Elle était vêtue d’une robe grise que Paul lui connaissait, toute simple, très montante, et dont les manches descendaient jusqu’à ses poignets.

Mais autour du cou pendait, sur le corsage, un merveilleux collier de grosses perles à quatre rangs, et ce collier, Paul ne le connaissait point.