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L’ÉCLAT D’OBUS
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— En avant ? Sautez dessus ! En avant donc, tas de froussards !

Les hommes ne bougeaient pas. Paul empoigna un fusil dans le faisceau qu’ils avaient formé près de la baraque, et, tout en les ajustant, il put, d’un regard jeté en arrière, constater que Bernard, enfin maître du prince Conrad, l’entraînait dans les profondeurs du tunnel.

— Il ne s’agit plus que de tenir cinq minutes, pensa Paul, afin que Bernard aille aussi loin que possible.

Et il était si calme à ce moment qu’il les eût comptées, les minutes, au battement régulier de son pouls.

— En avant ! Sautez dessus ! En avant ! ne cessait de proférer le sous-officier qui, sans aucun doute, s’il n’avait pu reconnaître le prince Conrad, avait discerné la silhouette de deux fugitifs.

À genoux, il tira un coup de revolver sur Paul. Celui-ci lui cassa le bras d’une balle. Mais le sous-officier vociféra de plus belle :

— En avant ! Il y en a deux qui ont fichu le camp par le tunnel ! En avant ! Voilà du renfort !

C’était une demi-douzaine de soldats des casernes, accourus au bruit des détonations. Paul, qui avait réussi à pénétrer dans la baraque, cassa le carreau d’une lucarne et tira trois fois. Les soldats se mirent à l’abri, mais d’autres arrivèrent, prirent les ordres du sous-officier, puis se dispersèrent, et Paul les vit qui escaladaient les pentes voisines afin de le tourner. Il tira encore quelques coups de fusil. À quoi bon ! Tout espoir d’une résistance plus longue disparaissait.