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Page:Leblanc - L’Île aux trente cercueils.djvu/202

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— Si creux que soit un arbre, dit Otto, il y a toujours des racines, et je ne puis guère admettre un passage à travers les racines.

— Encore une fois, nous verrons bien. Remue les feuilles, Conrad… enlève-les…

— Non, répliqua nettement Conrad.

— Comment non ? Et pourquoi ?

— Rappelez-vous Maguennoc ? Rappelez-vous qu’il a voulu toucher à la Pierre-Dieu et qu’il a dû se couper la main.

— Mais ce n’est pas ici la Pierre-Dieu ! ricana Vorski.

— Qu’en savez-vous ? Maguennoc parlait toujours de la porte de l’enfer. N’est-ce pas cela qu’il désignait ainsi ? »

Vorski haussa les épaules.

« Et toi, tu as peur aussi, Otto ? »

Otto ne répondit pas, et Vorski non plus n’avait pas hâte de risquer l’épreuve, car il finit par dire :

— Ma foi, rien ne presse. Attendons le petit jour. Nous abattrons l’arbre à coups de hache, ce qui nous montrera, mieux que tout, à quoi nous avons affaire et comment il nous faut procéder. »

Il en fut ainsi convenu. Mais, comme le signal avait été perçu par d’autres que par eux et qu’il ne fallait pas se laisser devancer, ils résolurent de s’établir en face même de l’arbre, sous l’abri que leur offrait la table immense du Dolmen-aux-Fées.

« Otto, ordonna Vorski, va nous chercher au Prieuré de quoi boire, et ramène également une hache, des cordes, tout ce qui est nécessaire. »

La pluie commençait à tomber avec une violence extrême. Ils s’installèrent aussitôt sous le dolmen, et, tour à tour, chacun prit la garde, tandis que les autres dormaient.

Nul incident ne marqua cette nuit. La tempête fut d’une grande violence. On entendit le mugissement des vagues. Puis, tout s’apaisa peu à peu. Au petit jour, ils attaquaient le chêne qui bientôt, tiré par les cordes, s’abattait.