« Veinard ! tu es aux premières loges, toi, tu n’en perdras pas une goutte. Hein ! ça fait plaisir, un peu de lumière dans ces ténèbres ? Depuis le temps qu’on patauge, on éprouve le besoin d’une direction vigoureuse. Moi, je t’assure que je commence à ne plus m’y reconnaître… Pense donc ! Une énigme qui dure depuis des siècles et des siècles, et que tu n’as fait qu’embrouiller !
— Bandit ! Voleur ! grinça Vorski.
— Des insultes ! et pourquoi ? Si tu n’es pas à ton aise, parle-nous de François.
— Jamais ! il mourra.
— Mais non. Tu parleras. Je te permets de m’interrompre. Pour m’arrêter, tu n’auras qu’à siffler un air : « J’ai du bon tabac » ou bien « Maman, les p’tits bateaux qui vont sur l’eau ». Aussitôt, j’enverrai aux recherches et, si tu n’as pas menti, on te laissera tranquille ici, Otto te détachera, et vous pourrez filer avec la barque de François. C’est convenu ? »
Il se tourna vers Stéphane Maroux et vers Patrice Belval.
« Asseyez-vous, mes amis, car ce sera un peu long, mais pour être éloquent, j’ai besoin d’auditeurs… des auditeurs qui seront des juges aussi.
— Nous ne sommes que deux, dit Patrice.
— Vous êtes trois.
— Avec qui ?
— Voici le troisième. »
C’était Tout-Va-Bien. Il arrivait au petit trop, sans plus se hâter qu’à l’ordinaire. Il fit fête à Stéphane, remua la queue devant don Luis, d’un air qui disait : « Toi, je te connais, nous sommes copains… » et prit place sur son derrière, comme quelqu’un qui ne veut déranger personne.
« Parfait, Tout-Va-Bien, s’écria don Luis, tu éprouves, toi aussi, le désir de te renseigner sur l’aventure. Cette curiosité t’honore, et tu seras content de moi. »
Don Luis paraissait enchanté. Il avait un auditoire, un tribunal. Vorski se tordait sur son arbre. L’heure était vraiment délicieuse.