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LE HASARD FAIT DES MIRACLES

« Eh bien, voilà, mademoiselle. L’inspecteur Béchoux, qui a eu le temps d’asseoir sa conviction sur des bases sérieuses, insiste vivement auprès de vous pour que vous vouliez bien confirmer les résultats de son enquête. Comme vous et moi n’avons encore échangé que quelques mots, auriez-vous l’obligeance de dire ce que vous savez relativement au drame dont fut victime le comte d’Alescar, votre frère ? »

Élisabeth d’Alescar, grande et pâle en ses voiles de deuil, de beauté grave, avec un visage austère qui semblait tressaillir parfois de tous les sanglots qu’elle contenait, répliqua :

« J’aurais préféré garder le silence et ne pas accuser. Mais, puisque vous me conviez à ce devoir pénible, je suis prête à répondre, monsieur. »

Barnett reprit :

« Mon ami, l’inspecteur Béchoux, désirerait savoir à quelle heure exacte vous avez vu votre frère pour la dernière fois ?

— À dix heures du soir. Nous avions dîné gaiement, comme d’habitude. J’adorais Jean, qui était de quelques années plus jeune que moi et que j’avais presque élevé. Nous étions toujours heureux ensemble.

— Il sortit dans la nuit ?

— Il ne sortit qu’un peu avant l’aube, vers trois heures et demie du matin. Notre vieille bonne l’entendit.

— Vous saviez où il allait ?

— Il m’avait dit la veille qu’il allait pêcher à la ligne, du haut de la terrasse. C’était un de ses plaisirs favoris.

— Donc, sur l’espace de temps qui va de trois heures et demie au moment où l’on a découvert son corps, vous ne pouvez rien dire ?