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L’AGENCE BARNETT ET Cie

que je ne parte… Voilà… tu ne m’as jamais aimé… Tu m’as épousé… à cause de ma fortune… »

Elle protesta, indignée, contre une accusation si cruelle à cette heure solennelle. Mais il lui avait saisi le poignet, et il répétait, confusément, d’une voix de délire :

« À cause de ma fortune, et tu l’as prouvé par ta conduite… Tu n’as pas été une bonne épouse, et c’est pourquoi j’ai voulu te punir… En ce moment même, je suis en train de te punir… Et j’éprouve une joie affreuse… Mais il faut que cela soit… et j’accepte de mourir parce que les perles s’évanouissent… Tu ne les entends pas qui tombent et qui s’en vont au torrent ? Ah ! Valérie, quel châtiment !… les gouttes qui tombent… les gouttes qui tombent… »

Il n’avait plus de forces. Les domestiques le portèrent sur son lit. Bientôt le docteur arrivait, et il vint aussi deux vieilles cousines que l’on avait averties et qui ne bougèrent plus de la chambre. Elles semblaient attentives aux moindres gestes de Valérie, et toutes prêtes à défendre les tiroirs et les commodes contre toute atteinte.

L’agonie fut longue. Le baron Assermann mourut au petit jour, sans avoir prononcé d’autres paroles. Sur la demande formelle des deux cousines, les scellés furent mis aussitôt à tous les meubles de la chambre. Et les longues heures funèbres de la veillée commencèrent…

Deux jours plus tard, après l’enterrement, Valérie reçut la visite du notaire de son mari qui lui demanda un entretien particulier.

Il gardait une expression grave et affligée, et il dit aussitôt :

« La mission que je dois remplir est pénible, madame la baronne, et je voudrais l’exécuter aussi rapidement que