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Page:Leblanc - L’Image de la femme nue, 1934.djvu/46

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maurice leblanc

ce déchaînement de tempête, fut si profond que Stéphane commença de se réveiller peu à peu. Il portait encore sur sa poitrine l’impression du jeune corps qui s’y était abandonné, mais, quand il eut repris conscience, il s’aperçut que le doux fardeau n’y était plus. Il allongea le bras autour de lui : personne sur le divan. S’étant levé, il constata, à la clarté des bougies vacillantes, que la pièce était vide.

Il s’enveloppa dans sa pèlerine déroulée, ouvrit la porte et appela. Aucune réponse. Sous la pluie, qui tombait maintenant molle et nonchalante, il courut jusqu’à la remise. Seul restait Sauvageon.

Indifférente à l’assaut des rafales et aux pièges de la nuit, sa maîtresse d’un soir avait disparu, en compagnie de son cheval et de son chien.

Courir après elle, dans les ténèbres, et sans même savoir la direction prise, c’eût été folie. Stéphane rentra, alimenta de bûches les braises du foyer, et retourna s’étendre sur le divan. De nouveau, les grandes flammes jouèrent au creux de la vaste cheminée. Dans cette même lumière joyeuse qu’elles répandaient, il revécut les heures divines et, amoureusement, évoqua sa mystérieuse maîtresse. Elle n’avait pas l’ampleur et la magnificence de la Vénus, et certainement point son extase impudique. Mais elle était de la même race épanouie et provocante, et la gorge surgissait avec la même fierté dans son double essor.