Page:Leblanc - La Femme aux deux sourires, paru dans Le Journal, 1932.djvu/110

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Elle avoua :

— Je n’en sais rien. Il a une façon d’imposer sa volonté. On ne peut pas lui résister.

— Voilà ! voilà ! tu ne lui as pas résisté… tu en fais l’aveu.

— Il ne m’a rien demandé du tout.

— Oui, n’est-ce pas ? Il s’est contenté de te baiser la main. Eh bien, je te jure Dieu que Clara va payer pour lui. Je vais lui secouer les puces, à celle-là, et sans douceur.

Gorgeret partit dans un état d’exaspération qui le faisait gesticuler en pleine rue et parler à haute voix. Ce diabolique personnage le mettait hors de lui. Il était persuadé que l’honneur de sa femme avait subi des dommages sérieux, et que, en tout cas, la coupable aventure se poursuivrait. La meilleure preuve n’en était-elle pas que Zozotte prétendait n’avoir pu reconnaître le quartier où il demeurait ? Est-il admissible qu’on ne recueille aucune indication sur un itinéraire suivi deux fois ?

Son collaborateur Flamant l’attendait à la police judiciaire et lui apprit que le Parquet ne devait procéder au premier interrogatoire que dans la journée, lorsque Gorgeret aurait fourni de nouveaux éléments d’information.

— Parfait ! s’écria-t-il, l’ordre est catégorique, hein ? Allons relancer la petite, Flamant. Il faut qu’elle bavarde. Sans quoi…

Mais l’ardeur combative de Gorgeret devait fondre tout à coup en face du spectacle le plus extraordinaire et le plus imprévu : une adversaire absolument transformée, aimable, souriante, enjouée, docile au point qu’il se demanda si depuis l’avant-veille elle n’avait pas joué toute une comédie de défaillance et de protestation. Elle était assise sur une chaise, sa robe bien arrangée, sa chevelure bien mise en valeur, et elle lui fit l’accueil le plus cordial.

— Qu’y a-t-il pour votre service, monsieur Gorgeret ?