Page:Leblanc - La Femme aux deux sourires, paru dans Le Journal, 1932.djvu/57

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pour qu’on en tire quelque chose… mais tout de suite.

Gorgeret y consentit, puis s’en alla.

Raoul s’accroupit alors près de l’Arabe et lui dit à voix basse :

— Tu me remets, hein ? C’est moi, Raoul, le type du quai Voltaire qui t’a donné deux billets. En veux-tu deux autres ?

L’Arabe bredouilla :

— Ça dépend… J’aime pas trahir… cependant…

— Oui, c’est le grand Paul qui t’a empêché de filer. Mais qu’est-ce que ça peut te faire puisqu’on doit le prendre à l’issue ?

L’Arabe s’emporta, et, la voix rageuse :

— De la fichaise ! Il y en a une autre, nouvelle… un escalier qui remonte à l’impasse.

— Crebleu ! dit Raoul, avec dépit. Voilà ce que c’est que de se fier à Gorgeret !

— T’es donc de la police, toi ?

— Non. Mais on marche ensemble, à l’occasion. En quoi puis-je t’aider ?

— En rien, pour l’instant, puisqu’on me reprendrait les billets. Mais il n’y a pas de preuves contre moi. Quand je serai relâché, envoie-moi de l’argent poste restante. A. R. B. E. bureau 79.

— Tu as donc confiance en moi ?

— Faut bien.

— Tu as raison. Combien veux-tu ?

— Cinq mille.

— Fichtre ! tu as de l’appétit.

— Pas un de moins.

— Soit. Tu les auras si ton renseignement est bon… et si tu ne souffles pas mot de Clara la Blonde. Alors, on trouvera le grand Paul ?

— Oui, tant pis pour lui… Il m’a joué un sale tour…

— Quand le trouvera-t-on ?

— Ce soir…

— Où ?

— À dix heures… au Casino Bleu… une nouvelle boîte.

— Il y sera seul ?

— Oui.

— Pourquoi va-t-il là ?

— Il espère toujours trouver sa poule blonde… la tienne, hein ?… Seulement, c’est une soirée de gala… ce n’est pas le grand Paul que tu verras.

— Valthex, alors ?

— Oui, Valthex…

Raoul posa encore quelques questions, mais il semblait que l’Arabe eût dévidé son écheveau de confidences, et il refusa d’en dire plus long.

D’ailleurs, Gorgeret revenait de l’issue, l’air déconfit. Raoul l’entraîna, en se moquant de lui.

— Bredouille, hein ? Que veux-tu ? Vous marchez toujours tous comme des idiots, sans vous renseigner à fond. N’importe, ne te désole pas.

— L’Arabe a parlé ?