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Page:Leblanc - La Femme aux deux sourires, paru dans Le Journal, 1932.djvu/89

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— Tout est pour le mieux, dit Raoul, qui revenait à ses habitudes d’ironie tranquille. C’est à la concierge d’agir. Elle est responsable. Nous, nous sommes en dehors de la question.

Le troisième étage était composé de chambres pour les domestiques, vides par conséquent à cette heure de la journée, et de mansardes où il y avait des malles ou de vieux meubles hors d’usage. Des cadenas fermaient celles-ci. Raoul tordit l’un d’eux. La mansarde était éclairée par une lucarne, à laquelle il accéda aisément.

Clara, muette, le visage tragique, obéissait machinalement à tout ce qu’il ordonnait. Deux ou trois fois, elle répéta :

— J’ai tué… j’ai tué… Tu ne m’aimeras plus…

Et l’on voyait que ce meurtre et que l’influence de ce meurtre sur l’amour de Raoul constituaient son unique pensée, et qu’elle n’était même pas effleurée par le souci de sa sécurité, par la poursuite possible du policier Gorgeret, et par ce qu’il allait advenir de leur fuite sur les toits.

— Nous y voilà, dit Raoul, qui, lui, au contraire, ne se préoccupait — chaque chose à son temps — que de porter au maximum les chances de réussir son entreprise. Comme tout s’arrange à notre avantage ! Le cinquième étage de la maison voisine est à la même hauteur que le toit de la nôtre. Tu avoueras…

Comme elle n’avouait rien du tout, il changea de sujet pour appuyer son contentement.

— C’est comme à l’égard de ce forban de Valthex, il a été assez maladroit pour justifier, pour nécessiter notre riposte. Donc, cas de légitime défense, s’il en fut jamais. Il nous attaquait… notre devoir était de prévenir son mauvais coup. Notre situation est excellente.

Si excellente que fût la situation, il fallait se mettre à l’abri, et Raoul y pourvoyait avec ardeur et con-