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Page:Leblanc - La Machine à courage, 1947.pdf/164

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CHAPITRE V

CONVALESCENCE



Vernet-les-Bains. ― … D’abord, résurrection ; mais après ― un carcan de défenses. Ne pas voir, sentir, comprendre, admirer… ne rien faire, ne rien vouloir, n’aspirer à rien et surtout ne s’intéresser à rien. Ne plus communiquer avec les choses. Maintenir l’aiguille du cadran sur le mot « indifférence » et n’en même pas souffrir. Tenir un livre de Rimbaud dans mes deux mains et ne pas l’ouvrir. Voir la lune sur les glaciers, le couchant les rosir, et n’avoir pas de battements de cœur. Une peine sans contour, sans accent, une peine morte.

Étendue dans cette non-vie, j’ai dit au docteur :

« ― Comment revivre ? Je n’ai jamais de forces que lorsque je les dépense. »

Ses yeux se sont arrondis :

« ― Vous voulez quoi ? ― thés, dancing, casino ? »

J’ai crié avec impatience :

« ― Non, non, mais je veux exister… c’est tout et plus que tout… »


Seules Monique et moi ― pas d’argent pour trois voyages. … Je vis coincée entre deux contraires : récupérer et travailler