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Page:Leblanc - La Machine à courage, 1947.pdf/166

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CHAPITRE VI

OPÉRATION.



Quand j’écrivis le titre de « Machine à courage » en pensant à moi et à tant d’autres artistes, j’ignorais les pires maux et leur écho terrifiant dans l’esprit. Je ne savais rien des souffrances physiques. Maintenant il ne me déplaît pas d’avoir connu cette sorte de steeple-chase, ce bondissement par-dessus le plus grand obstacle. Haute école finale où les énergies sont requises pour maintenir un équilibre qui fuit…

Je déteste la manière dont on se comporte généralement avec la douleur. Ce que l’on nomme par exemple : l’honneur de souffrir. Cette façon de se draper dans le malheur, et la supériorité de ceux qui disent aux plus jeunes qu’ils ne sont rien car ils n’ont pas souffert. Si la douleur faisait de la vertu il y a longtemps que le monde serait parfait. Il appartient à chacun de créer l’existence de ce qu’il vit. Si je ne sais pas faire quelque chose de mon bonheur ou de mon malheur ils ne seront rien.

La maladie m’a révélé de nouveaux aspects de la vie. Souvent elle donne forme à l’exaltation ― une forme plus réelle que celle causée par les poisons — une exaltation à sa place.

Mais ce qui m’a étonnée à chaque nouvel accident, c’est de constater comme j’étais prête… comme on est prêt sans le savoir à la douleur et au risque dernier. Quelques heures avant une opération, un dimanche, à la campagne, j’étais rentrée les