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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

Par complaisance, Gilberte l’interrogea :

« Et comment avez-vous perdu ?…

— Oh ! c’est toute une histoire, un tas d’affaires obscures où mon pauvre mari, un brave homme s’il en fût, s’est laissé gruger par un marchand de biens, un nommé Despriol. Vous vous rappelez, près de Notre-Dame-sur-l’Eau, cette maison abandonnée qui vous a frappée hier, je ne sais pas trop pourquoi ? Eh bien, Despriol habitait encore là avec sa femme, il y a une quinzaine d’année. Elle était charmante, Henriette Despriol, j’en avais fait mon amie, et elle montait au Logis quand cela lui plaisait… son mari aussi d’ailleurs, car M. de la Vaudraye ne le quittait guère, et moi, je ne me défiais pas de lui, tellement il semblait honnête et bon enfant, et tellement M. de la Vaudraye me cachait avec soin les spéculations malheureuses où l’entraînait son mauvais génie. En une heure, tout fut découvert… Despriol s’enfuyait après avoir perdu, ou plutôt volé, ce qui nous restait. Nous étions ruinés. »

Elle fit une pause, puis reprit :

« Il y a mieux : le soir même, ma chère amie Henriette venait se jeter à mes genoux et me suppliait de lui donner de l’argent pour rejoindre son mari, caché aux environs, et pour leur permettre de passer à l’étranger et de refaire leur fortune. C’était vraiment de l’audace, je la mis à la porte. Par malheur, je l’avais laissée seule un instant dans ma chambre. Une heure plus tard, je constatais la disparition d’un coffret contenant tous mes bijoux. On courut chez elle… plus personne.