Page:Leblanc - La Robe d’écailles roses, 1935.djvu/167

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
163
LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

vant elle. Tout ce qui n’est pas des paroles de vénération, je le considère comme une insulte pour celle que j’aime. »

Il la poussa dehors avec une autorité implacable. Mais Gilberte leur barra le chemin.

« Non, Guillaume, pas ainsi. Si l’on se sépare, que ce ne soit pas sur des mots de colère… Je vous aime trop tous deux… Oui, tous deux, madame, » affirma-t-elle de sa voix irrésistible.

Sa douceur fut plus forte que la violence de Guillaume. Il ne bougea pas. Mme de la Vaudraye se laissa ramener. Gilberte la fit asseoir et s’agenouilla.

« Agissez selon votre conscience, mais… je vous en prie, sans amertume contre moi… Quoique vous décidiez, ne me retirez pas votre affection… »

Il y avait peut-être dans la rigidité de Mme de la Vaudraye comme une revanche sur Gilberte. Cette enfant qui l’avait toujours dominée par sa noblesse et sa candeur, elle jouissait de la voir à ses genoux, de la juger du haut de ses principes et de la confondre du haut de son honorabilité.

Elle ne répondit pas. Gilberte continua :

« Vous vous rappelez notre promenade, il y a quelque temps : vous m’avez montré les anciennes limites de vos terres… Eh bien, j’ai tout racheté… pour vous le rendre. J’espérais vous ramener ici, dans cette maison qui vous appartient. Tout est à vous, vous auriez disposé de tout, vous auriez été la maîtresse, sans que personne eût le droit de vous demander des comptes, vous auriez repris à Domfront votre place véritable, le Logis serait redevenu ce qu’il était… »