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MA FEMME ET SON MARI

Un chauffeur conduisait sa voiture. Il s’assit près de lui, tandis que moi je prenais place dans le tonneau, auprès de sa femme, ou plutôt auprès de l’amas de fourrures et de voiles qui représentait sa femme.

Tout cela fut effectué rapidement. Eux aussi ils étaient pressés. Il n’y eut pas de présentation, et je jugeai inutile, du moins jusqu’à nouvel ordre, d’adresser la parole à ma voisine. Elle ne m’y conviait d’ailleurs pas, préoccupée surtout, me sembla-t-il, de se garantir contre un petit vent glacé qui nous prenait en écharpe.

Et tous quatre, sous le masque, sous le déguisement des peaux et des casquettes, nous roulâmes en silence.

Une demi-heure passa. L’automobile était une quatorze chevaux. Nous avancions.

Je jouissais profondément du charme infini de la vitesse, la pensée pour ainsi dire fluide, éparse, répandue autour de moi et mêlée aux choses.

Soudain, un chien bondit d’un côté à l’autre de la route. Il y eut un écart brusque. La voiture entra de biais dans un talus de sable qui amortit son élan, et nous fumes projetés assez doucement sur de la terre très molle.

Aussitôt debout, je m’occupai de mes compagnons. Les deux hommes se relevèrent sains et saufs, mais la femme ne bougeait pas.

Très inquiet, le mari se pencha sur elle, Elle n’était qu’évanouie. Il l’entendit même qui prononçait quelques mots. M’autorisant de mon titre de docteur, je