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UN AMOUR

celui-ci sentit que Jacques s’appuyait assez lourdement. Il se laissait conduire, d’ailleurs, et marchait la tête baissée. Ils suivirent la passerelle.

« Soutenez-moi, balbutia Jacques, je vais tomber. »

Mais subitement il se dégagea et, comme s’il obéissait à un élan irrésistible, il releva la tête.

« Gilberte ! cria-t-il… Henriette ! »

Une femme et une petite fille couraient au-devant de lui, à travers la foule. Il se précipita, les saisit toutes les deux dans ses bras et les serra contre sa poitrine, éperdument, follement. Et il bégayait :

« Gilberte… c’est toi… ma chérie… ah ! je savais bien… ma Gilberte… »

On les observait tous les trois, et les passagers ne comprenaient pas encore qui étaient ces deux femmes que Jacques embrassait avec tant d’exaltation.

« Gilberte… Gilberte… répétait-il… c’est toi… »

Il chancela, pris d’un étourdissement. Elle s’aperçut qu’il pleurait. Et tout à coup, devinant la cause de son émotion, elle lui dit :

« Jacques… Jacques… je suis sûre que tu as lu l’article de ce journal…

— Oui…

— Et tu as cru que c’étaient nous, les deux victimes ?…

— Je ne l’ai pas cru.

— Comment !

— Non, puisque j’avais ta lettre en même temps, ta lettre où tu me promettais de ne plus voir Georges de Brocourt et de ne point faire avec lui cette partie d’automobile.