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NOËL TRAGIQUE

— Oui, renversée. »

Et le paysan répéta :

« Renversée… ils ont démoli un mur… là… tout près…

— Mais… mais… balbutia Mme de Revez… ils vivent… ils sont vivants ?

— Non… ou plutôt oui… il y en a un qui vit… blessé seulement… il revient sur mon cheval…

— Et l’autre ? l’autre ?

— Ah ! l’autre est mort…

— Mais lequel est mort ?

— Ah ! dame, j’sais pas… j’sais seulement qu’il y en a un de vivant… et qu’il m’a dit : « Vite… courez au château, et dites à ma mère que j’arrive. »

— Imbécile ! tu n’avais qu’à lui demander, proféra le domestique en l’empoignant… Allons, viens, cherchons-le… »

Ils s’éloignèrent en hâte.

Alors les deux sœurs restèrent l’une en face de l’autre.

Et ce fut épouvantable.

Un espoir infini exaltait chacune d’elles, en même temps que chacune d’elles était secouée par une terreur folle. Bernard ? Paul ? Les noms des deux jeunes gens sautaient dans leurs cerveaux. Lequel vivait ? Qui, de l’une ou de l’autre, reverrait son fils idolâtré ? Qui, de l’une ou de l’autre, serait la mère en deuil, vouée aux larmes éternelles ?

« C’est Paul… c’est Paul qui vit… » pensait Mme de Revez.