— Comment, vous ne savez pas ?
— Non, mère n’a jamais voulu préciser.
— Mais elle ? Mais votre père ?
— Je ne sais pas non plus. »
Le notaire leva les yeux. Se moquait-elle ? Il vit son triste visage, son regard candide, réfléchit et continua :
« Vous venez de Londres ?
— Oui.
— Vous aviez des amis, là-bas, des connaissances ?
— Non, nous vivions seules.
— N’importe, avec l’adresse de la maison où vous habitiez, il serait facile de retrouver les traces de Mme Armand.
— Mère ne s’appelait pas Mme Armand à Londres, elle s’appelait Aubert.
— Mais Armand est votre nom véritable ?
— Je ne crois pas. À Liverpool où nous sommes restés trois ans, et où père est mort, l’an dernier, après avoir gagné tant d’argent, nous nous appelions Kellner. Auparavant, à Berlin, c’était Dumas… et puis à Moscou…
— Vous ne connaissez pas les raisons pour lesquelles vos parents changeaient ainsi de nom ?
— Je ne les connais pas.
— Vous ne voyez rien dans le caractère de vos parents qui puisse nous renseigner ?
— Rien.
— Ils s’accordaient ?
— Oh ! oui, ils s’aimaient tant ! et mère était si heureuse ! »