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Page:Leblanc - La Vie extravagante de Balthazar, paru dans Le Journal, 1924-1925.djvu/26

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Question qui ne se posait pas. Dernier rejeton des Coucy-Vendôme, Balthazar n’avait aucune envie d’établir entre le nommé Gourneuve et lui des liens de filiation.

Il répondit donc tout simplement, par déférence pour M. le directeur :

— Ai-je le droit de demander quelques explications ?

— Les explications font partie de la tâche que je suis heureux de remplir, déclara l’aimable fonctionnaire. Elles sont brèves. Voici tout d’abord une lettre de Gourneuve au préfet de police dont la conclusion est fort nette : « Vous savez maintenant, d’après les renseignements ci-dessus, monsieur le préfet, où et comment retrouver mon fils. Vous connaissez les moyens de l’identifier (tatouage des trois lettres et empreinte du pouce gauche). Vous connaissez le nom sous lequel il vit : Balthazar, et son nom réel : Gustave Gourneuve. Et vous savez enfin que c’est en souvenir des trois lettres marquées sur sa poitrine que j’ai choisi, pour la bande dont j’étais chef, la désignation des MasTroPieds.

» Dès que vous l’aurez retrouvé, monsieur le préfet, dites-lui le secret de sa naissance, lequel secret je n’ai pas osé lui dire de vive voix, et remettez-lui cette photographie qui est celle de sa mère, Angélique, devenue, depuis ma rupture avec elle, l’épouse légitime de M. Fridolin, saltimbanque et lutteur. »

Balthazar oscillait de nouveau sur sa chaise. Les précisions données par Gourneuve étaient vraiment troublantes. Néanmoins, il se débattit :

— Qui prouve que cette lettre ?…

— Pourquoi Gourneuve aurait-il menti ? interrompit M. le directeur. Toutes ses paroles et tous ses actes la confirment. Ainsi, nous savons, par les confidences qu’il fit à son compagnon de cellule, qu’il chercha plusieurs fois à vous adresser des communications. Il semblerait que Gourneuve avait dérobé à sa victime un paquet de titres et que son intention obstinée était de vous dire l’endroit où ces titres étaient cachés.

Une lumière confuse envahissait le cerveau de Balthazar. Est-ce qu’il n’avait pas reçu une de ces communications ? Ne devait-il pas penser que l’appel du notaire était une chose, et la missive cachetée une autre chose, et qu’il s’était trompé en attribuant à Coucy-Vendôme une lettre écrite par Gourneuve après sa condamna-