aristocrate ! Elle ne mérite pas le pommadé qui la suit. Que veut-il ? Mari jaloux ? Prétendant évincé ? Ou plutôt bellâtre en quête d’aventure ? Oui, ce doit être cela. Le monsieur a tout à fait la tête d’un homme à bonnes fortunes et qui se croit irrésistible.
Elle traversa la place de l’Opéra, sans se soucier des véhicules qui l’encombraient. Un camion voulut lui barrer le passage : posément elle saisit les rênes du cheval et l’immobilisa. Furieux, le conducteur sauta de son siège et l’injuria de trop près ; elle lui décocha sur le nez un petit coup de poing qui fit jaillir le sang. Un agent de police réclama des explications : elle lui tourna le dos et s’éloigna paisiblement.
Rue Auber, deux gamins se battant, elle les saisit au collet et les envoya rouler à dix pas. Puis elle leur jeta deux pièces d’or.
Boulevard Haussmann, elle entra dans une pâtisserie et Raoul vit de loin qu’elle s’asseyait devant une table. Le monsieur qui la suivait n’entrant pas, il y pénétra et prit place de façon qu’elle ne pût le remarquer.
Elle se commanda du thé et quatre toasts qu’elle dévora avec des dents qui étaient magnifiques.
Ses voisins la regardaient. Elle demeurait imperturbable et se fit apporter quatre nouveaux toasts.
Mais une autre jeune femme, attablée plus loin, attirait aussi la curiosité. Blonde comme l’Anglaise, avec des bandeaux ondulés, moins richement vêtue, mais avec un goût plus sûr de Parisienne, elle était entourée de trois enfants pauvrement habillés, à qui elle distribuait