Nous allons monter sur le toit… On domine toute la vallée… Ah ! la longue-vue…
En passant, il saisit l’instrument.
Marthe se précipita. :
— Qu’y a-t-il donc ?
— Impossible de tenir là-bas, fit le sergent… ils sont trop nombreux… on se replie…
— Mais alors, ils vont venir ?
— Oui, oui, ils viennent…
Marthe s’avança jusqu’à la terrasse. Un flot de soldats jaillissait de l’escalier.
Dans un coin, elle aperçut Philippe.
Il apostrophait les hommes :
— Ils viennent ?
— Oui.
— Ils ont passé la frontière ?
— Non, pas encore.
Il se tourna vers sa femme et lui dit, comme une bonne nouvelle :
— Ils n’ont pas encore passé la frontière.
Et il alla au-devant d’un autre groupe de soldats.
Alors, Marthe pensa que le destin lui envoyait le secours qu’elle implorait. Elle n’avait plus qu’à s’en remettre aux événements.
IV
— Clairon !… le ralliement… au pas gymnastique… et sans bruit.
C’était le capitaine Daspry, qui arrivait à son tour, l’allure rapide, mais le visage grave et résolu du chef qui commande en une heure solennelle.
Il dit à Philippe :
— M. Morestal est toujours malade ?
Mme Morestal accourait justement.
— Mon mari dort… Il est très las… la morphine… Mais si vous avez besoin de quelque chose, je puis le remplacer. Je connais ses intentions, ses travaux.
— Nous allons tenter l’impossible, dit l’officier.
Et il ajouta, en s’adressant à son lieutenant :
— Quant à rester là-bas, c’eût été fou, n’est-ce pas, Fabrègues ? Il ne s’agit point de démolir quelques uhlans, comme nous l’avons fait, mais de tenir contre toute une brigade qui grimpait l’autre versant… Ah !