Page:Leblanc - Le Bouchon de cristal, paru dans Le Journal, 25-09 au 09-11-1912.djvu/84

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ward, verrier à Stourbridge, avait fourni au député Daubrecq un flacon de cristal conforme au modèle. Le mot « cristal » me frappa. Je partis pour Stourbridge, je soudoyai le contremaître de la verrerie, et j’appris que le bouchon de ce flacon, d’après la formule même de la commande, avait été évidé intérieurement de manière à laisser un vide qu’il fût impossible de soupçonner.

Lupin hocha la tête.

— Le renseignement ne laissait aucun doute. Pourtant il ne m’a pas semblé que, même sous la couche d’or… Et puis la cachette serait bien exiguë.

— Exiguë, mais suffisante, dit-elle.

— Comment le savez-vous ?

— Par Prasville.

— Vous le voyez donc ?

— Depuis cette époque, oui. Auparavant, mon mari et moi, nous avions cessé toutes relations avec lui, à la suite de certains incidents assez équivoques. Prasville est un homme de moralité plus que douteuse, un ambitieux sans scrupules, et qui certainement a joué dans l’affaire du canal des Deux-Mers un vilain rôle. A-t-il touché ? C’est probable. N’importe, j’avais besoin d’un secours. Il venait d’être nommé secrétaire général de la préfecture. C’est donc lui que je choisis.

— Connaissait-il, interrogea Lupin, la conduite de votre fils Gilbert ?

— Non. Et j’eus la précaution, justement en raison de la situation qu’il occupe, de lui confirmer, comme à tous nos amis, le départ et la mort de Gilbert. Pour le reste, je lui dis la vérité, c’est-à-dire les motifs qui avaient déterminé le suicide de mon mari, et le but de vengeance que je poursuivais. Quand je l’eus mis au courant de mes découvertes, il sauta de joie, et je sentis que sa haine contre Daubrecq n’avait point désarmé. Nous causâmes longtemps, et j’appris de lui que la liste était écrite sur un bout de papier pelure, extrêmement mince, et qui, réduit en une sorte de boulette, pouvait parfaitement tenir dans un espace des plus restreints. Pour lui comme