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Pendant que se passaient ces événements, Florence, dans sa chambre, se demandait, tremblante et éperdue, comment elle pourrait échapper à ceux qui la poursuivaient.

Elle regarda sa main. Le Cercle Rouge y imprimait toujours son anneau écarlate.

Elle sentait que, cette fois, toute son énergie l’abandonnait, et, une seconde encore, elle eut le désir d’aller d’elle-même se livrer, mais soudain ses yeux tombèrent sur la fenêtre. Comment n’y avait-elle pas déjà songé ? C’était la seule issue. C’était son dernier espoir de salut. La fenêtre donnait sur un autre côté du jardin, et par là, sans doute, elle pourrait fuir.

Grimpant sur le rebord de la fenêtre, Florence s’engagea sur l’échelle fleurie conduisant au jardin.

Si elle réussissait, si personne ne l’arrêtait dans sa fuite, elle pouvait atteindre l’écurie et sauter sur son cheval. Ensuite elle verrait…

Pour le moment, elle n’avait qu’un désir, aigu, affolé, presque inconscient et instinctif : fuir… fuir ces hommes qui voulaient s’emparer d’elle.

Elle avait compté sans Silas Farwell.

Celui-ci, après avoir vu Allen disparaître dans la maison, à la suite de la fugitive, avait, avec sang-froid, examiné rapidement la situation.

— À quoi bon, se dit-il, m’engager dans la maison à la suite de Randolph Allen ? Il n’a pas besoin de moi pour arrêter une jeune fille. Non, ce que j’ai de mieux à faire, c’est de rechercher s’il n’existe pas une seconde issue qui pourrait permettre à la fugitive de nous échapper.

Mettant en pratique ce raisonnement logique, il fit le tour de la maison et, ayant découvert une porte de service, il s’y plaça en faction, l’oreille aux aguets, pour entendre ce qui se passait à l’intérieur.

— Elle est encore dans la maison, murmura-t-il en percevant les bruits de la lutte. Cette fois-ci, nous la tenons.

Un bruit léger de branches froissées lui fit tourner la tête.

Il resta immobile, retenant son haleine, devant le spectacle inattendu qui s’offrait à lui.

Par l’échelle fleurie, Florence Travis descendait.

Elle descendait légère et furtive, avec mille précautions et regardant partout autour d’elle, partout, sauf au pied de l’échelle.

Quand elle atteignit le dernier échelon, elle sauta légèrement à terre.

Hélas ! un piège l’attendait, qui se referma sur elle. Ce piège, c’était les deux bras tendus de Silas Farwell, qui la saisirent solidement.

Folle de peur et de rage, Florence, désespérément, se débattit, tentant de rompre l’étreinte qui la maintenait captive. Mais Silas Farwell, bien qu’elle le frappât de toutes ses forces, ne lâcha pas prise.

— Je vous en prie, mademoiselle, dit-il avec calme, ne m’obligez pas à être brutal. C’est en vain que vous chercheriez à vous dégager. Je vous tiens. Vous ne m’échapperez pas.

De la fenêtre, une voix appela.

C’était Randolph Allen. Ayant redoublé ses efforts, il était parvenu à forcer la porte de la chambre, malgré l’obstacle qui lui était opposé. D’un dernier coup d’épaule, il avait renversé le fauteuil et, bousculant Mary, s’était jeté dans la pièce.

La pièce était vide.

En quelques pas il fut à la fenêtre et, penché sur la barre d’appui, il put apercevoir Silas Farwell, tenant solidement sa proie.

— Ne la lâchez pas ! s’écria-t-il. Je descends.