— Haut les mains ! répéta Forville.
— Pas la peine, dit Ellen-Rock. J’ai perdu la partie.
À l’aveu d’Ellen-Rock, reconnaissant sa défaite, Forville répondit par un redressement de tout son être.
« J’ai perdu », disait l’homme qu’il redoutait plus que tout au monde. Victorieux sur toute la ligne, Forville se gonfla d’importance et de vanité et tendit son bras jusqu’à la limite.
— Tes armes ! ordonna-t-il… Et tout de suite… Jette-les par terre…
Ellen-Rock haussa les épaules et s’assit tranquillement.
— Je n’en ai pas. Est-ce que je me doutais de ton alliance avec Boniface et de cette embuscade ?
L’autre avança, pas à pas, son revolver braqué. La sérénité d’Ellen-Rock le mettait hors de lui. Sa figure se tordait en une grimace affreuse, et il bredouillait :
— Tu es fichu, mon bonhomme ! Il faut que tu en passes par où je veux, sinon je tire. Tu entends, crapule ? Rien ne peut m’empêcher de te tuer comme un chien, si tu n’acceptes pas mes conditions.
— Lesquels ? dit Ellen-Rock.
— Le dossier d’abord !… Plus de chantage contre moi !… Ma liberté absolue !… Aucune dénonciation possible… Et puis, par-dessus le marché, cinq cent mille francs.
— C’est tout ce que tu demandes ? dit Ellen-Rock.
Forville frappa du poing sur le bureau et articula furieusement :
— Cinq cent mille francs ! C’est mon chiffre !… Cinq cent mille !…
Le major Boniface s’était approché et, pris d’un vertige subit, ébloui par l’énormité de la somme, criait en même temps que Forville :
— Cinq cent mille francs chacun ! Pas un sou de moins ! C’est ma part ! Tu m’as assez grugé quand j’étais à ton service !… Cinq cent mille francs !
— En or ? ricana Ellen-Rock.
— En or ! répéta bêtement Forville, que son triomphe enivrait et qui ne savait plus trop ce qu’il disait.
— Allons, dit Ellen-Rock, en se levant, je vois que vous bafouillez tous les deux et que vous n’en sortirez pas sans mon aide.
Forville s’effara d’apercevoir, debout en face de lui, la haute silhouette d’Ellen-Rock et, tout en le