Page:Leblanc - Les Confidences d’Arsène Lupin.djvu/210

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— S’il l’avait ! Je voyais la liasse des billets dans ses mains, la canaille ! Je me serais plutôt fait tuer… Ah ! on s’est battu, va.

— Il n’était donc pas armé ?

— Pas plus que moi. On avait ses doigts, ses ongles, ses dents. Tiens, regarde, il m’a mordue, là. Et je criais ! et j’appelais. Seulement, voilà, je suis vieille… il m’a fallu lâcher…

— Tu le connais, l’homme ?

— Je crois bien que c’est le père Traînard.

— Le chemineau ? Eh ! parbleu, oui, s’écria le fermier, c’est le père Traînard… Il m’avait semblé aussi le reconnaître… Et puis, depuis trois jours, il rôde autour de la maison. Ah ! le vieux bougre, il aura senti l’odeur de l’argent… Ah ! mon père Traînard, ce qu’on va rigoler ! Une raclée numéro un d’abord, et puis la justice. Dis donc, la mère, tu peux bien te lever maintenant ? Appelle donc les voisins. Qu’on coure à la gendarmerie… Tiens, il y a le gosse du notaire qui a une bicyclette… Sacré père Traînard, ce qu’il détalait ! Ah ! il a encore des jambes, pour son âge. Un vrai lapin ! »

Il se tenait les côtes, ravi de l’aventure. Que risquait-il ? Aucune puissance au monde ne pouvait faire que le chemineau s’échappât, qu’il ne reçût l’énergique correction qu’il méritait, et ne s’en allât, sous bonne escorte, à la prison de la ville.

Le fermier prit un fusil et rejoignit ses deux valets.

« Rien de nouveau ?

— Non, maître Goussot, pas encore.

— Ça ne va pas tarder. À moins que le diable ne l’enlève par-dessus les murs… »