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Page:Leblanc - Les Dents du Tigre, paru dans Le Journal, du 31 août au 30 octobre 1920.djvu/212

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Dans trois ou quatre heures, l’hôtel de l’ingénieur Fauville allait sauter. Cela, il le savait de la façon la plus sûre. Avec autant d’exactitude que les lettres mystérieuses étaient arrivées à leur destination malgré tous les obstacles qui s’y opposaient, l’explosion se produirait à l’heure indiquée. L’artisan infernal de l’œuvre maudite l’avait voulu ainsi. À trois heures du matin, il ne resterait rien de l’hôtel.

— Au secours ! Au secours !

Il retrouvait des forces pour crier désespérément, et pour que sa voix retentît au-delà des pierres et au-delà des boiseries.

Puis, comme il ne semblait pas que l’on répondît à son appel, il s’interrompit et longtemps écouta. Aucun bruit à l’entour. Le silence absolu.

Alors, une angoisse terrible le couvrit de sueur. Si les agents, renonçant à la garde des étages supérieurs, s’étaient confinés, pour passer la nuit, dans les pièces du rez-de-chaussée ?

Comme un fou, il saisit une brique et frappa, à diverses reprises, sur la pierre d’entrée, espérant que le bruit se propagerait à travers l’hôtel. Mais aussitôt, une avalanche de moellons, détachés par le choc, s’abattit sur lui, le renversa de nouveau et l’immobilisa.

— Au secours ! Au secours ! Au secours !

Le silence. Le silence énorme, implacable.

— Au secours ! Au secours !

Il avait l’impression que ses cris ne dépassaient pas les parois qui l’étouffaient. D’ailleurs sa voix devenait de plus en plus faible, gémissement rauque, haletant, qui expirait en son gosier meurtri.

Il se tut, écoutant encore, de toute son attention anxieuse, le grand silence qui enveloppait comme avec des couches de plomb le cercueil de pierre où il gisait. Toujours rien. Aucun bruit. Personne ne