Page:Leblanc - Les Dents du Tigre, paru dans Le Journal, du 31 août au 30 octobre 1920.djvu/276

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gure convulsée de haine, sans plus essayer de se contenir.

— Monsieur le préfet, nous arrivons au but. Je connais le chemin qui nous y mènera. La bête fauve sera traquée cette nuit… demain au plus tard… Monsieur le préfet, la lettre qui accompagne ces documents, la lettre non signée que mademoiselle vous a remise, cette lettre fut écrite par la mère supérieure qui dirige une clinique située avenue des Ternes. En faisant une enquête immédiate dans cette clinique, en interrogeant la supérieure, en la confrontant avec mademoiselle, on remontera jusqu’au coupable lui-même. Mais il ne faut pas perdre une minute… sinon, ce sera trop tard, la bête fauve aura pris la fuite.

Son emportement était irrésistible. Sa conviction s’imposait avec une force contre laquelle on ne pouvait lutter.

M. Desmalions objecta :

— Mademoiselle pourrait nous renseigner…

— Elle ne parlera pas, ou du moins elle ne parlera qu’après, quand cet homme aura été démasqué devant elle. Ah ! monsieur le préfet, je vous supplie d’avoir confiance en moi comme les autres fois. Toutes mes promesses n’ont-elles pas été exécutées ? Ayez confiance, monsieur le préfet, ne doutez plus. Rappelez-vous que toutes les charges, et les plus lourdes, accablaient Marie-Anne Fauville et Gaston Sauverand et qu’ils ont succombé malgré leur innocence. La justice voudra-t-elle que Florence Levasseur soit sacrifiée comme les deux autres ? Et puis, ce que je demande, ce n’est pas sa libération, mais le moyen de la défendre… c’est-à-dire une heure ou deux de répit. Que le sous-chef Weber soit responsable d’elle. Que vos agents nous accompagnent. Ceux-là, et d’autres aussi, car ce n’est pas trop pour prendre au gîte l’abominable assassin.

M. Desmalions ne répondit pas. Au bout d’un instant il emmena Weber à part, et il eut avec le sous-chef une conversation qui dura quelques minutes. En réalité, M. Desmalions ne semblait pas très favorable à la demande de don Luis. Mais on entendit Weber qui disait :

— N’ayez aucune crainte, monsieur le préfet, nous ne risquons rien.

Et M. Desmalions céda.

Quelques moments plus tard, don Luis Perenna et Florence montaient dans une automobile avec Weber et deux inspecteurs. Une autre auto, chargée d’agents, suivait.