Page:Leblanc - Les Heures de mystère, paru dans Gil Blas, 1892-1896.djvu/22

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buait une personnalité. Je l’eus. On m’appelait la Vierge de fer. Je le fus.

Mais je fus la bonne Vierge. Ma conscience, faite de douleur, fut faite simultanément de pitié. Ainsi s’explique le prodige. La matière dont on m’avait pétrie s’était lassée sans doute du sang qui l’imprégnait et des gémissements qui résonnaient en elle. Et, en vérité, je le crois, elle eut pitié. Et je naquis d’un effort surnaturel de cette matière vers l’affranchissement, d’une révolte des atomes contre la cruauté de l’homme,

Je fus bonne et miséricordieuse. Je tuai. La fatalité de mon corps exigeait le crime : je le commis brutalement, instantanément. Les flèches de mes seins allaient droit au cœur. Et la tendresse de mon âme enveloppait la pauvre âme effarée, la consolait et la réchauffait, tandis que tombait au gouffre le cadavre inutile.