Page:Leblanc - Les Milliards d'Arsène Lupin, paru dans L'Auto, 1939.djvu/127

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— Elle m’a fait fuir et a pris ma place. C’est seulement après que j’ai compris pourquoi ! Elle aimait Arsène Lupin, acheva Patricia, les sourcils froncés.

— On peut choisir plus mal, dit Velmont, d’un air détaché.

— Saïda, la tigresse, l’a trouvée agonisante sous la tente abattue et l’a emportée, sans que je puisse intervenir. Ce fut affreux. »

Patricia frissonna.

« Où est Maffiano ? Où sont ses complices ?

— Ils rôdent encore aux alentours, mais avec prudence. Ah ! les misérables !… »

Elle reprit son fils et l’embrassa passionnément.

« Mon chéri ! Mon chéri !… Tu n’as toujours pas peur, n’est-ce pas ? Saïda ne t’a pas fait de mal ?

— Oh ! pas du tout, mère. Elle court doucement, pour m’éviter les secousses, j’en suis sûr… Je suis aussi bien que dans tes bras.

— Enfin, vous vous entendez bien, toi et ta bizarre monture. C’est parfait, mais il faut dormir un peu, maintenant. Et Saïda, aussi, doit dormir. Conduis-la jusqu’à sa niche. »

L’enfant se mit debout, prit la monstrueuse bête par une oreille et la tira vers l’autre bout de la chambre, où un matelas était disposé dans un placard, près de l’alcôve, où se trouvait le lit de Patricia.

Mais Saïda, à mesure qu’elle avançait, opposait à l’enfant une évidente mauvaise volonté, qui se traduisit par un grondement irrité. À la fin, elle s’immobilisa et, accroupie sur ses hanches, devant le lit de sa maîtresse, la tête au niveau des pattes, elle se mit à gronder de plus belle, tout en battant le parquet d’une queue furieuse.

« Eh bien ! Saïda, fit Patricia en se levant de son siège, qu’y a-t-il donc, ma belle ? »

Horace regardait la tigresse avec attention.

« On dirait, observa-t-il, que des gens sont cachés sous votre lit, ou du moins dans l’alcôve. Saïda les a repérés.

— Est-ce vrai, Saïda ? » dit Patricia.

La bête énorme répondit d’une voix plus rageuse et, se remettant sur ses pattes, bouscula de son mufle puissant le lit dont le fer alla buter contre le mur latéral.

Un triple cri de terreur retentit, poussé par des gens effectivement cachés sous le lit et à demi découverts à présent.