Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/23

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— Je suis enchanté, je l’ai fait bavarder, sans qu’elle s’en doutât, et je sais maintenant un tas de choses intéressantes concernant ses goûts, ses besoins, le genre de vie qu’il lui faut. Ses moindres paroles indiquent une excellente éducation, un fond solide et une humeur égale.

Et à voix basse, il pria son interlocuteur de lui communiquer exactement la situation pécuniaire de ces dames.

— Vous comprenez, on ne doit pas s’embarquer sans biscuit.

Chalmin s’éloignant, cette entrevue n’eut pas de résultats immédiats. Mais, le lendemain même de son retour, il retrouvait la jeune fille chez les Bouju-Gavart et assistait à son entrée dans le monde. Il ne la quitta pas, non plus qu’au bal des Lefriche et à la soirée des Lassalle.

Il continuait auprès d’elle son système inquisiteur. À brûle-pourpoint il lui décochait une demande, souvent indiscrète. Et sur des sujets exigeant une étude complète de son propre caractère, des heures de méditation, un enchaînement de déductions rigoureuses, Lucie s’expliquait carrément, en quelques phrases brèves qui en imposaient à Robert. Elle s’adjugeait telle qualité, se décernait tel défaut, et lui, enthousiasmé de cette franchise, accordait à ces réponses une valeur absolue, la même