Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/243

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malles des bonnes et congédia sa femme de chambre.

Son affection pour Javal acquit à cette époque un caractère aigu. Elle lui consacra tout ce que sa nature contenait de tendresse et de désintéressement. Elle commit même des imprudences. Profitant d’une absence de Chalmin, ils se rejoignirent le soir. Ils allèrent ensemble au théâtre. Ils soupèrent au cabaret. Quel divertissement ce lui fut de doter les glaces de son petit nom, Lucette, ainsi qu’il l’appelait !

Par miracle, Robert ne devina rien. Mais des potins confus jaillirent, qui s’éparpillèrent çà et là en calomnies précises. On citait des noms. Parrain l’en avertit, d’un mot rapide, dans la rue. Elle se moqua de lui. Le monde ! Elle ne s’en souciait guère. Une sorte d’affolement l’incitait aux pires sottises.

Tout système de dissimulation s’émiettait si bien en son esprit qu’elle accueillit avec enthousiasme une idée baroque, émise distraitement par Javal. Ses tracas d’argent continuaient et, fatigué de se débattre, il avait soupiré :

— Hélas ! si tu étais libre !

Elle distingua dans cette exclamation plus qu’un souhait, une demande formelle. Son amour lui défendait toute hésitation. Le divorce s’imposa incontinent à elle, comme l’unique issue. Elle se blâma même de n’avoir point