Page:Lebreton - Biographie rouennaise.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nait, le 4 février 1689, une tragédie de Laodamie qui eut quelque succès. Brutus, autre tragédie, représentée le 18 décembre 1690, en eut un très grand, ce qui fit dire à de Vizé, dans son Mercure, que Mlle Bernard était une rivale très dangereuse pour ceux qui suivaient alors la carrière du théâtre.

Voltaire, qui, trois ans plus tard, traitait le même sujet, se souvint de quelques-uns des meilleurs passages de cette pièce, et fit plus que de les imiter.

Ces deux tragédies, qui avaient attiré sur leur auteur les regards de Louis XIV, lui valurent de ce monarque une pension de deux cents écus. Mme la chancelière de Pontchartrain, dont les conseils avaient déterminé Mlle Bernard a renoncer à écrire pour le théâtre, lui faisait aussi une pension et l’honorait de son amitié.

La réputation que s’était acquise par ses ouvrages cette compatriote et alliée des Corneille et de Fontenelle lui fit ouvrir les portes de la célèbre académie de Ricovrati, de Padoue. Mlle Catherine Bernard mourut à Paris dans l’année 1712, et fut inhumée dans l’église Saint-Paul.

Les ouvrages qu’elle a laissés et qui ont été imprimés sont : les Malheurs de l’Amour (Eléonore d’Ivrée), Paris, Michel Groult, 1687, in-12. — Le Comte d’Amboise, Paris, 1689. — Brutus, tragédie, 1691. — Inès de Cordoue, nouvelle espagnole, Paris, 1696, in-12. — On attribue encore à Mlle Bernard une tragédie de Bradamante, que l’on croit être la même que celle qui se trouve dans le théâtre de Thomas Corneille ; ce qui n’est pas mieux prouvé que la prétendue collaboration de Fontenelle à la tragédie de Brutus, fait trop légèrement avancé par quelques biographes. L’éloge de cette Rouennaise, dont le talent littéraire mériterait d’être plus connu, se trouve dans l’Histoire du Théâtre français, des frères Parfait.

(Voir une courte Notice biographique publiée par M. Cassin dans la Revue de Rouen, numéro d’octobre 1845.)


BERRUYER (Joseph—Isaac), né le 9 novembre 1681, entra de bonne heure dans la congrégation des Jésuites, où il devint professeur d’humanités. Doué d’une imagination vive et colorée, il écrivit l’Histoire du Peuple de Dieu, dans un style qui dut paraître avec raison peu conforme à la simplicité des saintes Écritures. Le ton romanesque et beaucoup trop poétique qui domine dans cet ouvrage, des peintures un peu risquées et l’altération du texte dans quelques endroits, ayant paru des défauts que ne pouvaient atténuer des passages pleins de chaleur et d’élégance, firent regarder l’ouvrage comme répréhensible. La Sorbonne et plusieurs évêques le soumirent à la censure ; deux papes, Benoît XIV et Clément XIII, le condamnèrent, et le Parlement, intervenant à son tour, en ordonna la suppression. Une polémique des plus vives s’engagea entre les partisans et les adversaires de Berruyer, qui, malgré tout le bruit