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POÈMES ANTIQUES.

Le cavalier Nestor, et Lyncée aux grands yeux
Qui du regard pénètre et la terre et les cieux,
Et les profondes mers, et les abîmes sombres
Où l’implacable Aidès règne au milieu des Ombres ;
Et vingt autres héros, avec le fils bien né
D’Aisôn, brave, prudent et fier comme Athèné.
Je supplie avec eux ta sagesse profonde.
Sur leur respect pour toi tout leur espoir se fonde.
Parle ! que répondrai-je à ces rois belliqueux ?
Ils n’attendent qu’un chef, mais Argô n’attend qu’eux.
J’écoute, car, demain, dès l’aurore naissante,
Il me faut retourner vers la mer mugissante.

— Les Dieux, dit le Centaure, ont habité parfois
Les bruyantes cités, et les monts et les bois,
Alors que de l’Olympe abandonnant l’enceinte
Ils dérobaient l’éclat de leur majesté sainte.
Ainsi, roi de la Thrace, à tes augustes traits,
Je me souviens du Dieu qui lance au loin les traits.
Tel, exilé des cieux, pasteur de Thessalie,
Je le vis s’avancer dans la plaine embellie ;
Son port majestueux, ses chants le trahissaient,
Et les Nymphes des bois sur ses pas s’empressaient.
Ta parole, mon hôte, est douce à mon oreille,
Nulle voix à la tienne ici-bas n’est pareille ;
Mais, comme un roi puissant à des enfants épars
Dispense ses trésors en d’équitables parts,
L’impassible Destin, obéi des Dieux mêmes,
Ordonne l’Univers de ses décrets suprêmes.