Page:Leconte de Lisle - Œuvres, Poèmes tragiques.djvu/211

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
197
LES ÉRINNYES.

Qui dira si, jamais, les Dieux mêmes ont su
De quelle haine immense, encore inassouvie,
Je haïssais cet homme, opprobre de ma vie !
Trois fois je l’ai frappé comme un bœuf mugissant,
Et trois fois le flot tiède et rapide du sang
A jailli sur ma robe, ineffable rosée !
Et plus douce à mon cœur qu’à la terre épuisée
Ta fraîche pluie, ô Zeus, après un jour d’été !


TALTHYBIOS.

J’admire ton audace, et reste épouvanté.


KLYTAIMNESTRA.

Je l’atteste, louez ou blâmez, que m’importe !
J’ai frappé sûrement, vieillards ! la bête est morte.


EURYBATÈS.

Ô femme, quel poison du noir Hadès venu,
Quel fruit maudit poussé hors d’un sol âpre et nu,
Ont corrodé ta bouche et ton sang ? Quelle rage
A soufflé dans ton cœur ce monstrueux courage
D’égorger ton époux de ces mains que voilà ?
Et qu’as-tu fait aux Dieux pour avoir fait cela ?


KLYTAIMNESTRA.

Mes mains ont accompli l’action que j’ai dite.
Elle est bonne ! et je m’en glorifie.