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Page:Leconte de Lisle - Contes en prose, 1910.djvu/166

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dianora


— Seigneur Pierre de Puccinelli, on me nomme Lorenzo de Cenami. Vous avez tué mon frère. Il me faut le venger. Êtes-vous prêt ?

— Seigneur Lorenzo, répondit Puccinelli, tel est votre devoir. Je suis tout à vous.

— Notre combat ne peut avoir lieu ici, seigneur. Il se pourrait qu’on nous interrompît. Suivez-moi. Je sais un endroit sûr, non loin d’ici.

Cela dit, il marcha en avant et conduisit son adversaire, par des rues détournées, derrière les remparts de la ville. Le ciel était pur et brillant, la campagne silencieuse ; le combat s’engagea. Nous n’en décrirons pas les péripéties. Puccinelli succomba. Lorenzo lui coupa la tête, qu’il cacha sous son manteau et rentra dans Lucques, se dirigeant vers la maison de Mme Catherine, où demeurait Dianora.

Elle était assise dans la vaste salle où s’était écoulée sa jeunesse, belle et pâle comme une statue de marbre. Sa tante, étant malade, s’était retirée de bonne heure. Elle attendait Puccinelli, qui tardait plus que de coutume. Ce retard l’inquiétait. Nous ne saurions dire si le remords de son crime travaillait le cœur de cette femme, dont les passions étaient si ardentes ; mais une sombre tristesse se lisait sur son visage, si beau et si doux. On eût dit que le pressentiment de ce qui allait suivre traversait son esprit. — L’impatience la força