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Page:Leconte de Lisle - Contes en prose, 1910.djvu/187

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marcie


— Si vous poussez un seul cri, si votre père et votre cousin reviennent ici, je les tue, murmura Fleurimont en se levant et en mettant la main dans sa poitrine. N’appelez pas, si vous tenez à la vie de votre père. Écoutez-moi ; je serai bref. Je vous aime tant que ma vie est un supplice. Il faut que cette torture ait un terme ; elle en aura un. Vous êtes en mon pouvoir, et vous ne m’échapperez pas. Suivez-moi ; j’ai là un cheval, voici le vôtre ; dans une heure nous serons en sûreté.

— Vous n’êtes pas seulement un fou, monsieur ; vous êtes un lâche. En quoi ai-je mérité que vous m’insultiez ? Que vous ai-je fait ? Qu’avez-vous à reprocher à mon père ?

— Je vous l’ai déjà dit : je vous aime, et ne puis vivre sans vous. Venez, ne m’obligez pas à employer la force ; ma résolution est immuable.

Marcie hésita un instant ; puis elle s’enfuit droit devant elle en criant :

— Rite ! mon père !

Un coup de fusil lointain répondit seul à ses cris. Fleurimont s’élança sur ses pas, la saisit dans ses bras et l’emporta vers son cheval.

— Misérable ! s’écrie-t-elle en se débattant, lâche ! Ô mon Dieu ! je suis perdue.

Elle réussit à se dégager de l’étreinte du petit blanc, par suite de la crainte instinctive qu’avait celui-ci de la blesser ;