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Page:Leconte de Lisle - Contes en prose, 1910.djvu/188

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marcie

mais la colère, la passion, le péril, bannirent de son cœur un reste de respect, et il se préparait à en finir, quand une main de fer le prit à la gorge et le renversa suffoqué.

— Job ! s’écria Marcie avec un cri de joie ; ô mon brave noir, tu m’as sauvée !

Job appuya son genou sur la poitrine du petit blanc, et, saisissant le couteau de chasse que celui-ci cachait dans sa veste, il dit gravement à sa jeune maîtresse

— C’est M. Fleurimont, du Piton-Rouge.

Là-dessus, il leva le couteau en l’air, et allait le plonger dans la gorge de son prisonnier, avec un grand calme, si Marcie n’eût poussé un cri de terreur.

— Job ! Job ! que fais-tu ?

— Chien de nègre ! murmura Fleurimont avec mépris, lâche-moi, où je te ferai mourir sous le bâton.

— C’est bon, dit Job en jetant le couteau ; si mamz’elle voulait... mais enfin, c’est bon !

En moins de cinq minutes, Job remettait sur ses pieds Fleurimont dont les mains et les bras étaient solidement liés derrière le dos.

— Détache-le, dit Marcie avec dignité ; qu’il parte. Cet homme est fou.

Job coupa d’un coup de couteau les liens du petit blanc qui disparut sous les arbres.